Nom : Stéphanie Bourdy
Lieu de résidence : Paris (75) & Bordeaux (33)
Activité : étudiante en thèse de littérature et histoire de l'art

Courriel : mj.bourdy@club-internet.fr 

 


Activités au sein du collectif :
contributions individuelles

Choix d'oeuvres :

Présentation personnelle :
Du haut de mes vingt-sept printemps, je reste une éternelle étudiante (vagabonde).
D'études d'histoire, d'art et de littérature, mon parcours universitaire est fait d'errances incessantes dans les méandres du savoir.

Qu'une soif de connaissance serve de fil d'Ariane à ce parcours. Et mon envie de liberté, d'expérimenter, de découvrir inlassablement. Refus d'appartenir à une école de pensée, de me couler dans le moule, de me laisser formater par notre Intelligentsia et Université vieillissante qui croule sous le poids de cerveaux sclérosés, stériles de mandarins toujours en manque de prestige, de légion d'honneur, etc.

Interdiction de bousculer leur savoir, leur territoire aux limites étriquées, spectres de déliquescentes certitudes qui pourrissent à ne pas être bousculées ou confrontées aux seules interrogations de cerveaux en fleur (Dont le nectar peut être amer).

Le prestige de notre tradition culturelle universaliste, cosmopolite héritée des Lumières se délite à l'image de ces costumes poussiéreux qui sabordent le renouveau de l'intelligence française ou européenne et l'enferment dans un système de pensée
archaïque et unilatéral. Chacun au chaud dans son domaine d'études, juge en trublion celui qui prône la transversalité, l'interdisciplinarité au sein de cette grande maison au toit fissurée.
Se faisant les témoins privilégiés et normalement lettrés d'une culture ancestrale sur laquelle l'Europe s'est construite. Ces frileux du cerveau oublient que nos civilisations rayonnèrent en Afrique, Amérique, Inde et jusqu'à la Chine. Nos racines ne sont
donc pas qu'européennes ! Clamons le haut et fort sur tous les toits et surtout au-dessus de l'Université qui à coup de grandes hypocrisies hissent ces esprits en gardiens du temple pour balayer sans raison valable (plutôt par peur de remettre en cause leurs minces certitudes) les infiltrations perturbatrices ! Ce système est totalitaire.

Travaillons en fourmi pour édifier des ponts entre les cultures. Eveillons-nous à construire des passerelles entre les différents domaines du savoir. Rasons les anciens systèmes pour élaborer un grand rassemblement de nos compétences respectives au service de l'humanité. L'art sans les sociétés, les hommes n'est rien.

Car au-delà de son identité culturelle, historique, l'être humain a toujours lutté pour le bien de tous sans distinction de nationalités, couleurs, origines sociales. Érigeons ces ponts de la connaissance entre tous et acceptons leurs interpénétrations. Nul parallèle, la vie, par conséquent n'est qu'une histoire de rencontres, de croisements et d'influences.

Combattons l'idée de racines seulement européennes. À bas l'hégémonie gréco-romaine et son diktat sur nos esprits. Allons plus loin à l'instar des grands hommes de tous les temps pour savourer par-delà nos différences, l'humanité en tous. Finis oukase et ostracisme en tout genre.
Soyons tous frères. Dépassons l'image de nos clivages. Prenons comme modèles les sociétés primitives qui ont rejeté l'idée d'un pouvoir dominateur et l'érection d'une classe dominante qui fabrique les faibles et la dépendance. En gros notre société
pourrie. Avançons sur le même pied d'égalité.
Et interdisons d'interdire.
Vous aurez compris ma nature à rejeter les idées reçues et à voir plus loin que les apparences. Avançons comme des chercheurs de perles dans ce monde putride. Dût l'injustice être la règle d'or, la concurrence, le leitmotiv c'est la vie qui l'emportera
peut-être à travers la fin méritée de ce monde schizophrène.

Pour l'instant, continuons à refuser ces lois, n'obtempérons pas, dussions-nous être marginalisés, pointés du doigt, c'est mieux que tout se passe en nous. C'est pourquoi j'ai choisi d'écrire, comme repli sur mes émotions et évasion d'un monde abject. La
poésie me permet d'être moi, d'observer las vagues qui se meuvent dans mon esprit, et les exprimer dans leur mouvement originel. Pas de limites, de contraintes, je regarde en une liberté (illusoire) mon monde et comme un oiseau le libère de la cage d'où il a grandi.

 

 


De cette morne ville

Me revient à l'esprit
Telle une lueur dans la nuit
L'image de l'amour en exil.

Que j'aime voir miroiter
Sur le tapis de mes souvenirs
Au son du Surbahar d'Adir
Tes yeux aux larmes de paix.

Et graver sur le carreau
Comme sur ma chair nue
L'heure de ta prochaine venue
Au souffle triste de mes os.

Abattu par trop d'attente
Le regard chavire dans les profondeurs
Accroché au sourire ivoirin du bonheur
Qui m'implore d'être patiente.

                                   Stéphanie Bourdy, Sarlat, 24 juin 2003.


Bordeaux, mon refuge
.

Comme de visages, la ville de Bordeaux jouit de noms divers. Elle s'est construite dans leur multiplicité. De Burdigala, Bourdeu, Bourdeaux, Bordeaulx au nom actuel, tous portent les marques des métamorphoses du passé. Son âme, elle, fut préservée en une métempsycose. Elle est celle de son fleuve, son port d'origine gallo-romaine. Autant d'appellations qui renferment une histoire de 2000 ans, à écouter, à observer dans les murmures des mascarons, les tressaillements des pierres. Elles soufflent l'air d'anciens vestiges à l'accent romain de la Burdigala d'Ausonne, aux venelles pavées et sombres d'époque médiévale. Là se joue la pièce de mon Bordeaux. Celle où mon esprit grandit, que j'aime et à ma vie manque ! Au gré d'une ballade à travers rues et quartiers il revient, à mes oreilles, le bruit du métal rougi, frappé sur l'enclume des ferronniers. Les échos des voix du peuple grouillant d'artisans résonnent encore sur les murs refroidis
d'anciennes échoppes, que mon oil d'un coup, embrasse pour remonter l'histoire des rues du " vieux Bordeaux ". Des Bahutiers à la Fusterie, du Chai des farines aux Argentiers, sans oublier la Rousselle toujours laborieuse.
Et le marteau cogne, le bois craque et travaille derrière les portes cochères d'où s'échappent en une fièvre travailleuse, fumées et poussières noires. Chatouillant mes narines, ce temps y dépose son odeur lointaine. En un ballet, la foule d'artisans continue sa danse aux abords du
fleuve. Ils sourient à la porte Cailhau, à Aliénor d'Aquitaine, qui tournée vers le fleuve, assure sa pieuse et royale défense.
Dans ce tohu-bohu, silhouettes et membres agités dessinent de larges ombres qui s'étirent en arc en ciel sur les berges encombrées. Les passants endimanchés et curieux en tout genre observent le spectacle d'ouvriers à la gouaille " bordeluche ". Ils déchargent de leurs mains aguerries, vivres et marchandises, sur des quais boueux parsemés de pinasses effilées pour un corps à corps avec
l'estuaire. D'une manouvre habile, toute la richesse marchande prend l'étroit chemin d'échoppes aux fenêtres à meneaux, ouvertes sur le négoce, en des convois branlants. Avec hissée, au mât de leur charreton en bons hommes de " Bourdeu ", la reconnaissance du port
nourricier.

                           Stéphanie Bourdy, Bordeaux, 18 mai 2003.

 

 

La voix de l'Inde.


 
I/

Comme il est difficile de parler du pays qui brûle mes semelles
de vent !
Autant de visions intériorisées qui peuplent ma route vers cet
ailleurs et réduisent mes ailes à néant. Leurs racines sont
profondes. Impossible de les hisser jusqu'au ciel des dieux.
Même leur appel demeure stérile. Ô combien je suis las des terres
grises, fumantes !
Et pourtant nul exil pointe à l'horizon. Que faire diantre pour
rompre mes liens pesants avec ce monde funeste et puant, libérer
mon corps de ses chaînes mercantiles ?
Je ne veux plus posséder, acheter et jeter. Les produits sont
pour les autres, peu pour moi. Je ne suis pas comme les autres.
Je viens d'ailleurs. Ils ne connaissent pas ma terre. Là vrai,
celle de mon âme. Les couleurs qui l'habitent, la voix de son
peuple, le visage de ses frères. Rien ne perce derrière ce voile
granulé qui illusionne les passants. D'où viens-je ? Qui suis-je
?
Vous voulez des confidences, je sens. Mais attention, les mots
cachent des réalités cruelles.
Ils portent le vide de nos existences, l'odeur de l'ennui et
l'ailleurs inconnu, mythifié.

II/

Des images s'inventent et creusent en mon esprit d'illusoires
vérités. Pour vous, seulement pour vous, l'unique. Votre sang
dans mes veines coule. Il bat de sa passion contagieuse dans mon
cour. Je suis vous et moi. Je vais vous parler de cette étrange
terre que j'ai faite mienne. Là où j'ai planté mon drapeau
imaginaire. Je me suis enfuie de ce monde pour l'autre. Ma tête
danse au son d'une voix inconnue, mes pieds trébuchent sur le sol
crevassé cherchant le lieu d'où l'appel a été lancé. Des paroles
me guident, la langue m'est étrangère, je cherche, j'halète,
vais-je arriver à la trouver ? Nul dialecte connu, qu'une musique
étrange sonne de bizarreries dans mon cerveau ébouriffé. Alors me
voici en contact avec l'ailleurs que je peuple de mes démons
intérieurs et de passion artificielle. L'aimer, y aller pour
connaître l'autre. L'unique qui se moque de cette fantaisie. Rien
de passager vous dis-je ! Une attirance pour la vie, une
déchirure du cour qui toussote d'émotions à trop penser à la
voix. Elle continue à me guider. Je la suis. Elle ressemble à une
incantation, un mantra. Récités pour ses dieux, sa félicité et sa
délivrance. Om mani padme om. Elle est là-bas, en Inde.
III/

Me voilà, comme la voix, je tourne et je ne m'arrête plus pour
m'attirer les grâces de son dieu. Ma robe est un feu d'artifice,
elle brille, écarlate. Jamais sur moi ont dansé autant de
couleurs. Je ne me reconnais pas. Je suis l'autre, l'étrangère
costumée à la peau brûlée, les yeux criblés de larmes suspendues.
La poussière nidifie et maquille ma peau, nouvelle. Je suis une
autre personne. La voix est devenue mienne. Je parle son langage,
son accent et pleure ses larmes mystiques.
Je suis née une deuxième fois là-bas pour racheter les fautes de
mon ancienne terre qui est morte. Un recueil dans ma besace
d'errante stipule mes nouveaux devoirs, mon karma, tout neuf : "
Tu dois préserver ton peuple adoptif des péchés de l'ancien,
l'éloigner des dangers qui t'ont fait mourir puis renaître dans
cette nouvelle condition. Tu es le seul témoin d'une fin
dramatique, apporte ton expérience aux visages de terre.
Garde-les de ne jamais suivre tes pas reliés à d'anciennes
racines destructrices. "

IV/

J'avais rêvé d'aller parmi eux. Me voilà gardienne de leur
bonheur, de leur terre. Non, plutôt dénonciatrice du malheur, de
l'horreur humaine, la mienne. Dieu préservez-moi. Je vais sous ce
ciel écrasant vers de nouvelles étoiles : elles ont le parlé
rond, enrobé des imposants Indiens du sud ; l'oil fin et étiré
sur de saillantes pommettes dorées qui sentent le métissage racé,
sanglant, des habitants du Nord. Fusion des chairs gourmandes et
du langage des dieux. Pureté mystique et syncrétisme. L'Inde est
ma vierge Marie, elle enfante, mais jamais n'est souillée. Nulle
autre ne se préserve comme elle. Mère d'innombrables peuples,
rites et langues. Et la nation indienne, unie, en toile de fond
au métissage, au chaos ordonné. Comme un dieu à plusieurs têtes
sur un socle unique, représentant les différents états du cosmos,
l'Inde résiste et engloutit dans ce corps géant la diversité
régnante. Siva est à l'image de la nation qui l'adore, dieu
destructeur et créateur aux bras multiples, aux trois têtes. À la
fois un et plusieurs.





V/

Ma nouvelle voix guide mes pas vers les chemins enneigés de
l'Himalaya, la plaine du Gange, les côtes baignées du Kerala, la
chaleur suffocante du sud, dans le Tamilnadu, pays des noirs
Tamouls, des dieux indiens à la face dansante, brûlée par le sel
marin.
Dravidiens, primitifs de l'Inde vous m'avez donné votre voix.
Elle s'étouffe là, en bord de mer, à Mahâbalipuram, au milieu de
monuments d'allure prestigieuse, d'inventivité débordante. Je
m'adonne au bavardage mental avec vos dieux, leur explique quelle
a été ma vie, mon rêve auprès d'eux, maintenant leur servante. Le
temple du rivage, irrésistible, avec son sourire fardé,
m'accueille. Je me recueille. Je suis de là, de partout, de nulle
part. Je dois guider les Hommes en cette terre éternelle,
respecter le dharma. Alors, je suis mon chemin solitaire et
décide d'abandonner la voix.  Plus de voix, de paroles, seulement
des actes.
L'acte de la foi. Au moindre faux-pas, punissez-moi de recouvrer
la voix ! L'ancienne, celle aux accents sanglants, aux
intonations meurtrières d'une terre morte aux sons de ses
mensonges. L'autre coule dans mon sang en fleuve d'amour,
secrète.

                                                                
Stéphanie Bourdy, Paris, 16 juillet 2003.
                                                         


Pensées indiennes.


Inde multicolore, mère de rêves anciens
Tu distilles ton parfum ambré sur ma peau d'Aryen,
Sombre humain à la couleur triste et l'oil morne
Je convoite tes délices sucrés avec morgue.

Tes dieux fous et insensés me visitent en amis
Aux côtés d'Orphée et Calliope attendris
Par les offrandes de tes mystiques créatures
Aussitôt disparues sur leur galopante monture.

Çiva, Visnu, Brahman hantent mes murs solitaires
Humble et bon, Civa guérit mes démons éphémères
Krishna jette ses pétales sur le voile de ma vie
Et Brahman m'inspire mélopées et mélancolie.

Le généreux Garuda me transporte loin de l'ennui
Dans un monde sonore où n'existe pas la nuit
Éclairée par les reflets célestes et colorés
Des larges saris, fantômes de terrasses délaissées.

Et l'esprit libre divague près des rives sacrées
Du Gange qui murmure sa mélodie mystérieuse
À un ascète méditant, venu purifier son karman.

Sur cette autre terre, je me perds avec l'envie religieuse
D'y rester. Tanjore, Madurai, Kanchipuram, Mahabalipuram
S'emparent de mon âme pour y planter leur majestueux gopuram !

                                                                            
Stéphanie Bourdy, Paris, 28.02.2003.



Aujourd'hui tinte l'heure des retrouvailles.
Que ma liberté s'accomplisse vaille que vaille !
Sans remord, ni honte. D'eux, je viens vous enlever
Au son d'estivale mélopée, o chère aînée.

Aucune souffrance passée n'est oubliée,
Comme deux jumelles au lit séparé
Qui buvaient au téton amer d'une étrangère
Seules, résignées, devant l'avanie de leurs congénères.

Et la passion dit : libérons l'amour en nous,
Nos poignets ligotés par les fous,
Ô Entendez, oreille des morts, notre cri d'espoir.

J'escalade, les monts de la colère écarlate,
Dans mes yeux vivent vos yeux et la mer plate,
Sur laquelle, la danse du soleil, unit nos deux corps.

                                                                             
Stéphanie Bourdy, Paris, 10 juillet 2003.




Dans les tréfonds de mon être
Vit au cour d'amers poisons
Une déchirure qui ride, au souvenir lointain,
Le visage d'amour.

Dans les tréfonds de mon cour
Bât une cathédrale de rêves
Aux flèches de douleur, qui percent
 Comme le ciel dévot, ma chair nue.

À l'humeur triste, elle se drape le jour,
 D'un voile sanglant.
                                                                           
Stéphanie Bourdy, Paris, le 21. 07. 03.





L'amour toujours là au faîte de l'été
Qui dicte sa loi d'insoumis au jour,
À la nuit. Et fait danser les heures étoilées
Au rythme d'enivrants tambours.

En une farandole d'images,
Il mène sa ronde au-dessus du bateau
Qui tangue sur l'océan de passage
Comme l'hymne à l'aimée sur les flots. 

Aérien, éphémère, il va et vient
À la recherche d'un port d'attache ou rien.
Je le capture pour dessiner un brin de rêve
Sur la feuille, qui boit à sa coupe, sans trêve.

Peu après l'ivresse surgit le fantôme du doute
Et ses acolytes pleurant de joie et de haine
Devant le film d'amour cérébral en route
Qui suspend mon temps au mat de misaine.